Ce que m’ont appris les Anglais
Partie VII

L’art de la convivialité

Chère lectrice, cher lecteur, 

Ce que vous voyez ci-dessus, c’est la façade de mon pub préféré en Angleterre. 

C’est le “Adam & Eve”, un bar dans le quartier d’Homerton à l’Est de Londres. 

Je vous adresse directement un “avertissement”, ou disclaimer comme disent les anglophones. 

Je ne m’apprête pas à faire la promotion de la consommation d’alcool, les effets de l’alcool sur le corps sont dévastateurs, même à petite dose. 

Je vous parle de ce bar car j’y ai découvert non pas l’ivresse, mais l’art de la convivialité, le vivre ensemble.

Et vous êtes directement concerné car les bienfaits de la convivialité sur la santé sont nombreux, je vous en parle dans un instant.

Le paradis, c’est les autres

Mais avant, laissez-moi vous parler de ce sujet près de mon cœur : la culture du pub britannique.

Dans les pubs, vous pouvez consommer de l’alcool mais aussi des soft, des boissons non alcoolisées, des en-cas et des repas.

En France, nous avons les terrasses de café mais nous n’avons pas l’équivalent du pub, et donc de la “culture du pub” qu’ont les Britanniques. 

Un mur est tacitement dressé entre les tables des cafés français alors qu’une fenêtre est grande ouverte entre les bancs des pubs anglais. 

Vous-même, il ne vous viendrait peut-être pas à l’idée d’engager la conversation avec votre voisin de terrasse si vous êtes en France ou en Suisse pour simplement discuter. 

Au Royaume-Uni, c’est la norme. Il serait presque étrange de ne pas échanger quelques mots avec vos voisins en prenant votre verre, seul ou accompagné.

Le pub est l’endroit où se retrouvent toutes les générations et tous les milieux sociaux (ou presque, cela dépend des quartiers). Vous pouvez y trouver des jeunes intermittents du spectacle, poètes et cinéastes, causant avec des ouvriers du bâtiment couverts de peinture, à côté de très sérieux banquiers et des avocats plus âgés.

Qui que vous soyez, vous n’êtes jamais seul au pub. 

D’ailleurs, l’origine du mot “pub” n’est pas anodine. Le mot vient de public house, endroit réservé à la réunion des communautés locales pour sociabiliser. 

Et si l’alcool ne coulait pas à flot dans ces endroits, ils seraient sans doute recommandés par le ministère de la Santé britannique.

La convivialité est bonne pour votre cerveau

Cette frontière sociale, plus lâche au Royaume-Uni qu’en France ou ailleurs, est très bonne pour votre santé.

Être entouré de personnes, engager des conversations sur des sujets nouveaux, faire des rencontres préservent une bonne santé cognitive. 

Je vous donne un exemple qui rejoindra peut-être une de vos propres expériences familiales.

Dans ma famille, une personne de plus de 80 ans a un début d’Alzheimer. Lors de mes visites, je ne sais jamais à quoi m’attendre.

Soit elle est plutôt déconnectée de la réalité et ne se souvient plus des personnes et des événements passés, soit elle est très alerte et semble être revenue à son état “normal”, avant la maladie. 

C’est troublant, aussi bien pour elle que pour ses proches. 

Toutefois, j’ai remarqué qu’après avoir passé du temps en famille, ou après avoir reçu de la visite, elle est plus “éveillée”, plus alerte. 

Quand elle passe plusieurs jours seule, le brouillard est de nouveau bien installé.

Ceci a une explication scientifique prouvée. Une étude publiée dans le journal Neurology de Harvard Health Publishing montre que les personnes seules, ou se sentant seules, entre 60 et 79 ans étaient 3 fois plus susceptibles de développer une forme de démence précoce. (1)

Cette étude va plus loin. Elle montre que les personnes seules ont des fonctions motrices diminuées (capacité à se concentrer, organiser des activités futures, se souvenir d’instructions) et ont une taille cérébrale inférieure aux personnes qui sont plus entourées.

Bluffant, n’est-ce pas ? 

Avez-vous des amis ?

Je vous pose la question de façon abrupte à dessein : avez-vous des amis ?

En défense d’un goût pour la solitude, on rétorque souvent “il vaut mieux être seul que mal accompagné”. 

C’est une erreur. Il faut comprendre que la solitude peut vous rendre malade, littéralement. 

Loin d’être une question de choix, la solitude enclenche un mécanisme biologique qui vous met à risque de maladies cardiovasculaires.

Une étude menée sur plus de 42 000 personnes et publiée par Nature en début d’année 2025 met en évidence un mécanisme biologique bien précis provoqué par la solitude. (2)

Ce mécanisme est à l’œuvre grâce à 5 protéines présentes dans votre sang lorsque vous faites l’expérience de la solitude sur le long terme. 

Pour les férus de biologie, il s’agit des protéines GFRA1, ADM, FABP4, TNFRSF10A et ASGR1.

À terme, ces protéines jouent un rôle important dans le développement de certaines maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2, les AVC ainsi que d’autres facteurs de mortalité. 

Vous n’êtes pas convaincu ? 

Les scientifiques affirment que les effets de l’isolement social et de la solitude sont comparables aux risques associés au tabagisme et à l’obésité. 

Devenez militant de la joie

Je tiens à le préciser, je comprends celles et ceux qui choisissent la solitude par goût, qui ont appris à prendre du plaisir dans la solitude. 

C’est peut-être votre cas et vous avez vos raisons.

Vous avez été déçu, trahi ou blessé par certaines amitiés, ou même par votre famille. 

Vous avez appris à vivre seul et à apprécier les moments passés avec vous-même et je vous en félicite : être heureux avec soi-même est le fondement d’une vie saine et épanouie

Toutefois, il faut savoir bien s’entourer. À commencer pour votre santé. 

Prenez l’exemple des centenaires des zones bleues partout dans le monde. 

D’ailleurs, savez-vous quel est le dénominateur commun de ces centenaires heureux ? 

Leur rôle au sein d’une communauté.

En écrivant ces lignes, je m’aperçois que je ne vous ai pas encore présenté mes vœux pour 2025.

Permettez-moi de le faire à présent : je vous souhaite une année riche en rencontres et en amitiés, car c’est bon pour votre santé.

Si vous n’habitez pas dans un pays où la culture du pub est de coutume, je vous invite à vous inscrire à un club de marche, de couture ou de cuisine. 

Passez le pas en assistant à un cours de gym dans le centre proche de chez vous, ou engagez la conversation avec une nouvelle personne en faisant vos courses ou en promenant votre chien.

La nouvelle année vous offre un prétexte parfait : souhaitez la bonne année à une personne qui vous sourit ou vous paraît sympathique. Ce bref échange sera déjà une petite victoire sur la solitude.

Pour ma part, 2025 sera sous le signe du partage et de l’optimisme. 

N’oubliez pas la fameuse phrase de Voltaire : “J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé.”

Dites-moi dans les commentaires quels sont vos conseils pour lutter contre la solitude, pour devenir des “militants de la joie” chaque jour. Je les lirai avec une grande attention.

Bonne année et bonne santé ! 

Mélanie Sigali

Sources : 

  1. https://www.health.harvard.edu/mind-and-mood/new-details-about-loneliness-and-dementia-risk 
  2. https://www.nature.com/articles/s41562-024-02078-1 

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23 Commentaires
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Bonjour et merci pour vos vœux et cet article très instructif! J’avoue que même si je suis plutôt indépendante de nature et que la solitude ne me dérange pas plus que ça, j’apprécie tout de même de pouvoir discuter avec d’autres personnes – même si je ne les connais pas! Un bon truc pour éviter d’être trop longtemps seul et d’avoir de nouvelles relations (amoureuses ou simplement amicales) : s’inscrire dans un club d’activités sportives ou autres! C’est la meilleure façon de ne jamais être morose, en plus de conserver la forme! Portez-vous bien et excellente année 2025!

Un grand merci pour cet article concernant les english pubs,j’ai eu le plaisir il y a quelques années,de travailler et donc d’habiter en Angleterre et les moments passés au pub sont des moments de sociabilisation, d’échanges,d’apprentissage de la langue.J’y ai découvert un peuple curieux(au bon sens du terme) et ravi de vous faire partager les » bonnes adresses ».J’ai eu la joie,il y a plus de 40 ans de rencontrer un certain Terry. H dans le sud (Dorset) qui était mon « evening manager ».Il m’a beaucoup aidé à m’intégrer ,nous sommes devenus AMIS et à ce jour nous nous considérons comme deux frères.Angleterre pays de mon coeur.

Oui, bien ecrit…

C,est pour cette raison que nous avons déménagé de France en Espagne, à 80 ans. La vie est plus conviviale, les espagnols vivent ensemble au café. Nous aurions dû le faire plus tôt. Bonne Année

Article très intéressant !
Il y a un peu de cette « culture-pub » sur les plages naturistes hors saison.
Les gens se saluent et discutent facilement comme si, le simple fait d’enlever leurs vêtements les entraînait à se détacher de tout conformusme social, de tout à priori…

J’ai un mal fou à rencontrer du monde, à faire connaissance avec les gens ; non pas que je sois difficile, mais dès qu’on commence à communiquer, ça finit par une demande de la personne d’argent, d’installation à mon domicile, voir à des relations sexuelles ; je ne peux malheureusement ni entretenir un un homme, ni donner de l’argent à quiconque, bien que j’aime faire des cadeaux (objets, attention), mais financièrement, c’est un peu dur !

Bonjour, merci pour vos voeux et je vous en souhaite de meme!
Il y a cinq ans,j’ai perdu mon mari… UN peu avant le premier confinement. Heureusement je me trouvais chez mon fils pour garder ma petite fille,puis’ coincee’ pendant 8 semaines. A mon retour a la maison, me retrouver seule m’etait difficile, j’ai toujours ete timide et n’osant pas engager la conversation,a part les formules de politesse, donc il a fallu ‘prendre’ sur moi si je ne voulais pas finir seule et me morfondre… J’ai ose sonner aux portes de nos amis et j’ai entretenu le lien . j’ai fais un peu plus connaissance de mes voisins car ca faisait 1 an qu’on avait emmenage quand mon mari est DCD;;; ON s’entraide tous,on se soutient dans les moments difficiles,je les aide comme je peux, on racontes des blagues,on fait des jeux et beaucoup de marches;;;on profite des moments presents. Je n’ai jamais eu autant d’amis de toute ma vie et je vais avoir 70 ans cette annee! je me sent bien dans ma vie et je vois mes enfants et autre famille autant qu’il est possible. Ca ne me fait rien de passer mes soirees seule car mes journees sont ‘riches’ de tout ce que je les ai remplies!
Donc je ne regrette pas ‘d’avoir ose’ ,je ne me suis jamais sentie aussi bien ! Le seul regret que je pourrai avoir…c’est de ne pas avoir ‘ose’ avant!…
Amities EVELYNE

Les réunions de famille sont très importantes pour nous. Même un simple café pris ensemble. Et les quelques bons amis que nous avons, mon mari et moi, sont source de rencontres chaleureuses

Bonjour,
Suite à votre article sur la convivialité/solitude, je vous livre mon commentaire.
J’ai 81 ans, en bonne santé (malgré un AVC et deux infarctus, dus à une « saloperie nosocomiale » ); et ,je vis à mi-temps seul, ou avec ma compagne.
La solitude me va très bien: elle me permet de vivre mes passions: la musique (je suis musicien de jazz -piano et « autres »-, donc j’improvise, qui est une forme de création.
Je lis beaucoup (la lecture est pour moi aussi indispensable que la respiration) sur des sujets divers, dont la politique. Et cerise sur le gâteau, je joue beaucoup aux échecs -le jeu des rois et le roi des jeux- (facilement 2h/jour) avec des joueurs du monde entier, et là, je peux vous dire qu’au niveau de l’activation des neurones, on n’a pas trouvé mieux !
D’ailleurs, ma compagne respecte mes moments de « solitude ».
En plus, je trouve souvent « les autres » inintéressants, banals… ce qui ne m’empêche pas d’être « sociable » à l’occasion, ce que je ne recherche pas obligatoirement !
Donc, pour moi, la solitude est une bénédiction !

Bonjour,
Venez prendre les transports marseillais, dans notre belle ville, les gens sont acceuillants et parlent souvent à leurs compagnons de voyages. Le soleil est dans leurs coeurs et pas seuleument sur le vieux-port